CHAPITRE III.
Mon cœur était si plein d’étonnement, que je restais comme un homme qui ne peut parler et se tait, et qui attend qu’on le conseille.
Quand mon ami : « — Que fais-tu ? Que regardes-tu ? à quoi penses-tu — dit-il — Ne sais-tu pas bien que je fais partie de cette foule, et qu’il faut que je la suive ? — »
« Frère, — répondis-je, — tu sais l’état où je suis, et que c’est le désir de savoir qui m’a si fort embrasé que ma marche est retardée par lui. — »
Et lui : « — J’avais déjà compris ton silence. Tu veux savoir qui sont encore ces autres amants. Je te le dirai, si cela ne m’est pas interdit.
« Vois ce grand, que chacun honore, c’est Pompée ; il a avec lui Cornélia qui pleure et se plaint du vil Ptolémée.
« L’autre, plus loin, est le grand roi grec qui ne vit pas Egisthe et l’impie Clytemnestre. Tu peux voir par là si l’Amour est bien aveugle.
« Voici un tout autre exemple de fidélité et d’amour : vois Hipermestre ; vois Pyrame et Thisbé, gisant tous les deux à l’ombre ; vois Léandre au milieu de la mer et Héro à sa fenêtre.
« Celui-là, si rêveur, est Ulysse, ombre aimable qu’attend et invoque sa chaste épouse ; mais l’amour de Circé le retient et l’enlace.
« Cet autre est le fils d’Hamilcar ; pendant tant