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tous les autres terrestres séjours, a été seule élue, vierge bénie, pour changer en allégresse les pleurs d’Ève. Fais-moi, tu le peux, digne de sa grâce, ô toi éternellement bienheureuse, et qui fus autrefois couronnée dans le royaume céleste.

Vierge sainte, pleine de toutes les grâces, qui par une vraie et très haute humilité montas au ciel d’où tu écoutes mes prières ; tu enfantas la source de pitié et le Soleil de justice qui rassérène les siècles remplis d’erreurs obscures et épaisses. Tu possèdes réunis en toi trois noms doux et chers : mère, fille et épouse ; vierge glorieuse, Dame du Roi qui as brisé nos liens et fait le monde libre et heureux, et dans les saintes plaies duquel je te prie, véritable bienfaitrice, de contenter mon cœur.

Vierge unique au monde, sans modèle ; qui as énamouré le ciel de tes beautés ; qui n’as eu ni supérieure, ni pareille, ni seconde ; tes saints pensers, tes actes pieux et chastes firent au vrai Dieu un temple sacré et vivant dans ta virginité féconde. Par toi ma vie peut être joyeuse, si à tes prières, ô Marie, vierge douce et pieuse, la grâce abonde là où abonda le péché. Les genoux de l’âme ployés, je te prie d’être mon guide, et de redresser ma voie tortueuse vers une bonne fin.

Vierge resplendissante et stable dans l’éternité, étoile de cette mer tempétueuse, guide sûr de tout fidèle nocher ; regarde en quelle terrible tourmente je me retrouve, sans gouvernail, et déjà je suis près de pousser le cri suprême. Mais pourtant mon âme en toi se fie. C’est une pécheresse, je ne le nie pas, ô vierge ; mais je te prie de ne pas laisser ton ennemi rire de mon mal ; ressouviens-toi que c’est notre péché