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d’un nuage obscur. Piquée ensuite au talon par un petit serpent, comme languit une fleur cueillie, elle s’en alla, non pas seulement tranquille, mais joyeuse. Ah ! rien autre chose au monde n’est durable que les pleurs !

Chanson, tu peux bien dire : ces six visions ont donné à mon maître un doux désir de mourir.


BALLADE I.

La douleur qu’il éprouve de survivre à Laure est adoucie par l’idée que Laure connaît son chagrin.

Amour, alors que florissait mon espoir et la récompense de ma longue fidélité, m’a enlevé celle dont j’attendais merci.

Ah ! impitoyable mort ! ah ! cruelle vie ! l’une m’a mis en deuil et a cruellement éteint mes espérances ; l’autre me retient ici-bas contre ma volonté. Et elle, qui s’en est allée, je ne puis la suivre, car elle n’y consent pas. Mais pourtant, à toute heure présente, ma Dame siège au milieu de mon cœur, et ce qu’est ma vie, elle le sait.


CANZONE IV.

Il se rappelle les grâces qu’il découvrit en Laure du premier jour où il la vit.

Je ne puis me taire, et je crains que ma langue ne produise un effet contraire à ce que pense mon cœur, lequel voudrait glorifier sa dame qui, du ciel, nous écoute. Comment pourrai-je, Amour, si tu ne me l’enseignes pas, égaler avec des paroles mortelles les œuvres divines et ce que recouvre la haute humilité en soi-même recueillie ? Dans la belle prison dont elle