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car avec son beau visage et ses suaves dédains, elle me fit, au milieu de mon ardeur, penser à mon salut.

Ô gracieux artifices, ô effets dignes d’eux : l’un a opéré avec la langue, l’autre avec les yeux, de façon que moi j’ai acquis de la gloire pour elle, et elle, de la vertu pour moi.


SONNET XXII.

Il traitait de cruelle celle qui le guidait vers la vertu. Il s’en repend et la remercie.

Comme va le monde ! maintenant je me délecte et je me plais à ce qui me déplaisait le plus ; maintenant je vois et je sens que ce fut pour mon salut que je souffris, et que j’eus à soutenir une courte guerre pour une éternelle paix.

Ô espérance, ô désir toujours trompeur ! et cent fois plus trompeur celui des amants ! oh ! combien c’eût été pis si j’avais reçu contentement de celle qui siège maintenant au ciel et gît sous la terre !

Mais l’aveugle Amour et mon esprit sourd s’égaraient si bien, qu’il me fallait aller de vive force là où était la mort.

Bénie soit celle qui dirigea ma course vers une meilleure rive, et qui, me leurant, réfréna ma volonté impie et ardente, pour m’empêcher de périr.


SONNET XXIII.

Triste le jour et la nuit, il lui semble la voir au lever de l’Aurore, et cela redouble sa peine.

Quand je vois du ciel descendre l’Aurore avec son front de roses et avec ses cheveux d’or, Amour vient