Page:Petrarque - Les Rimes de.djvu/179

Cette page a été validée par deux contributeurs.


SONNET CCI.

La beauté de Laure est la gloire de la Nature ; il n’y a donc point de dame qui se puisse comparer à elle.

J’ai vu deux beaux yeux, tout remplis d’honnêteté et de douceur, en une étoile telle qu’auprès de ces gracieux nids d’amour mon cœur lassé dédaigne toute autre vue.

Qu’elle ne se compare point à elle, celle qu’on prise le plus, à quelque époque, sur quelques bords étrangers que ce soit ; non plus que celle qui, par son éclatante beauté, jeta la Grèce dans les plus grands malheurs, et Troie dans les dernières convulsions ;

Ni la belle Romaine qui ouvrit avec le fer sa chaste et dédaigneuse poitrine ; ni Polixène, Isiphile et Argia.

Cette supériorité est, si je ne me trompe, une grande gloire pour la Nature, et pour moi une joie suprême. Mais quoi ? elle vient bien tardivement et s’en va bien vite.


SONNET CCII.

Les dames qui voudraient prendre des leçons de vertu, devront jeter les yeux sur Laure.

Que toute dame qui aspire à glorieuse renommée de sagesse, de vertu, de courtoisie, tienne ses yeux fixés sur les yeux de cette mienne ennemie que le monde nomme ma Dame.

C’est là qu’on apprend comment l’honneur s’acquiert, comment on aime Dieu, comment on réunit la chasteté à la grâce, et quel est le droit chemin pour aller au ciel qui l’attend et la désire.