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pare de moi ; et délivrée de cette façon, s’en va droit vers celle qui la menace.

Je m’étonne bien si parfois, pendant qu’elle lui parle et qu’elle pleure, puis l’embrasse, elle n’interrompt pas son sommeil, si toutefois elle l’écoute.


SONNET CXCVIII.

Il la regarde fixement et elle se couvre de son voile.

Sur ce beau visage pour lequel je soupire, et qui fait l’objet de mes désirs, mes yeux s’étaient arrêtés ardents et fixes, lorsque Amour — comme pour dire : à quoi penses-tu ? — souleva cette main honorée que j’aime en second lieu.

Mon cœur pris là, comme le poisson à l’hameçon, ou comme un jeune oiseau à la branche engluée — ce qui me donne comme un vivant exemple à bien faire — ne dirigea plus vers la réalité mes sens occupés ;

Mais ma vue privée de son objet, comme en un songe, s’ouvrait le chemin sans lequel son bonheur est imparfait.

Mon âme, entre l’une et l’autre de mes gloires, éprouvait je ne sais quel céleste et nouveau plaisir, et quelle étrange douceur.


SONNET CXCIX.

Le joyeux accueil que lui fait Laure, contre son habitude, l’a quasi fait mourir de joie.

De vives étincelles sortaient des deux belles lumières qui flamboyaient si doucement vers moi, et en même temps s’échappaient d’un cœur sage, au milieu de soupirs, de si suaves fleuves de haute éloquence,