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douce vue du bel et charmant visage qui me maintient en vie et qui est l’honneur de notre siècle.

Si pour monter au séjour éternel elle a quitté sa belle enveloppe, je prie pour que mon dernier jour ne se fasse pas attendre.


SONNET CXCIII.

Le doute où il est à l’égard de Laure l’épouvante, et il ne se reconnaît plus lui-même.

Dans l’incertitude de ma situation, tantôt je pleure, tantôt je chante ; et je crains et j’espère ; et par mes soupirs et mes rimes j’allège mon fardeau. Amour use toutes ses limes sur mon cœur tant affligé.

Or, arrivera-t-il jamais que ce beau visage sacré rende à mes yeux leurs clartés premières ? — Hélas ! je ne sais que penser de moi-même — ou bien les a-t-il condamnés à des pleurs éternels ?

Et pour prendre possession du ciel qui lui est dû, doit-il ne point avoir souci de ce qu’il arrivera sur la terre à ceux dont il est le soleil et qui ne voient que lui ?

Je vis dans une telle crainte et dans une lutte si continuelle, que je ne suis plus celui que j’ai été jadis ; tel celui qui, sur un chemin inconnu, s’est égaré et tremble de peur.


SONNET CXCIV.

Il soupire en pensant aux regards de celle dont, à son grand dommage, il a été forcé de s’éloigner.

Ô doux regards, ô propos courtois, viendra-t-il maintenant jamais le jour où je vous reverrai et où je vous entendrai ? Ô blonds cheveux, avec lesquels