Page:Petrarque - Les Rimes de.djvu/169

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ici-bas de l’existence des célestes esprits, celle qui enlève à l’univers la renommée !

Mon cœur, qui a voulu me quitter pour elle, en quoi il a fait très sagement, surtout s’il ne revient jamais, s’en va maintenant comptant tous les endroits où l’herbe a été foulée par son beau pied, et arrosée par les pleurs de ses yeux.

Il se serre contre elle, et dit à chaque pas : ah ! que n’est-il ici maintenant pour quelques instants, ce malheureux qui est déjà las de pleurer et de vivre !

Elle, se met à rire ; et le jeu n’est pas égal : tu es au paradis, et moi sans mon cœur je suis un roc, ô lien, consacré, fortuné et doux.


SONNET CLXXXV.

À un ami qui est amoureux comme lui, il ne sait dire autre chose que d’élever son âme à Dieu.

Le mal présent m’accable et j’en redoute un pire, auquel je vois la route ouverte si large et si aplanie, que je suis entré en une frénésie semblable à la tienne, et, que, obsédé par de durs pensers, je viens rêver avec toi.

Et je ne sais si c’est la guerre ou la paix que je demande à Dieu pour moi ; car le dommage que me cause cette guerre est grand, et la honte que j’éprouve à la cesser est pénible. Mais pourquoi languir plus longtemps ? Il n’arrivera jamais de nous que ce qui est ordonné déjà dans le souverain séjour.

Bien que je ne sois pas digne du grand honneur que tu me fais, trompé que tu es par Amour qui fait souvent voir faux l’œil le plus sain.

Je suis pourtant d’avis qu’il faut élever son âme