Page:Petrarque - Les Rimes de.djvu/126

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Puis, comme si une force plus grande le détournait, il lui faut suivre une autre voie, et, malgré lui, il faut qu’il consente à sa longue mort ainsi qu’à la mienne.


SONNET CXXVI.

Laure lui a plu uniquement pour son air humble. Il engage un ami à faire de même avec sa dame.

Geri, quand parfois s’irrite contre moi ma douce ennemie qui est si altière, une consolation m’est donnée, à savoir que je n’en meurs pas, et c’est grâce à cela seulement que mon âme respire.

Partout où, dans son dédain, elle jette les yeux, espérant priver ma vie de toute lumière, je lui montre les miens pleins d’une humilité si vraie, que tout son dédain est forcément repoussé.

S’il n’en était pas ainsi, je ne pourrais pas risquer de la voir autrement que comme la face de Méduse qui changeait les gens en marbre.

Fais donc ainsi toi-même, car je vois qu’il n’existe pas d’autre moyen ; rien ne sert de fuir devant les ailes dont use notre Seigneur.


SONNET CXXVII.

Le Pô pourra bien l’emporter de corps loin de Laure, mais non d’esprit.

Pô, sur tes puissantes et rapides ondes, tu peux bien emporter mon corps, mais l’esprit qui y est enfermé n’a souci ni de ta force ni de celle de personne.

Sans louvoyer à droite ni à gauche, il fend l’air tout droit vers son désir favorable, et dirigeant ses ailes vers le feuillage doré, il dompte l’eau et le vent, et la voile et les rames.

Pleuve altier, superbe, roi de tous les autres, toi