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et pleure et tremble. Il s’y cache, et ne paraît plus au dehors.

Que puis-je faire, moi qui crains mon maître, sinon rester avec lui jusqu’à l’heure suprême ? Quelle belle fin fait celui qui meurt en bien aimant !


SONNET XCI.

Il se compare au papillon qui, volant à la lumière, y trouve la mort.

Comme parfois, au temps chaud, un petit papillon, attiré par la lumière, vient voler dans les yeux, ce qui cause à lui la mort et aux autres la douleur ;

Ainsi je cours sans cesse à mon fatal soleil, c’est-à-dire à ces yeux où je trouve tellement de douceur qu’Amour n’écoute plus le frein de la raison, et que ce qui discerne est vaincu par ce qui veut.

Et je vois bien combien ils m’ont en mépris, et je sais que j’en mourrai vraiment, car mes forces ne pourront résister à la douleur.

Mais Amour m’éblouit si doucement, que je pleure sur la peine des autres et non sur la mienne ; et mon âme aveuglée consent à sa propre mort.


SIXAIN V.

Il raconte l’histoire fidèle de ses amours, et dit qu’il est bien temps de se consacrer à Dieu.

Sous le doux ombrage d’une belle ramure, j’ai fui en toute hâte une impitoyable lumière que le troisième ciel dardait sur moi jusqu’ici-bas ; et la brise amoureuse qui renouvelle la saison, débarrassait déjà les monts de leur neige, et les herbes et les branches verdissaient sur les rives.