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Mais de quelque façon qu’elle les gouverne ou qu’elle les tourne, ce n’est jamais le printemps pour moi.


BALLADE I.

Dès que Laure s’est aperçue de son amour, elle est devenue plus sévère pour lui qu’auparavant.

Je ne vous ai jamais vu, madame, quitter votre voile, soit au soleil, soit à l’ombre, depuis que vous avez reconnu en moi le grand désir qui empêche toute autre volonté de m’entrer au cœur.

Pendant que je tenais cachés les beaux pensers qui ont tué mon esprit de désir, j’ai vu votre visage s’orner de pitié. Mais quand Amour vous eut éclairée sur mon compte, alors furent voilés les blonds cheveux, et l’amoureux regard fut en lui-même recueilli. Ce que je désirais le plus en vous m’est enlevé. Ainsi me traita le voile qui, pour ma mort, par le chaud et par le froid, cache la douce lumière de vos beaux yeux.


SONNET IX.

Il espère dans le temps qui, en rendant Laure moins belle, la lui rendra plus compatissante.

Si ma vie peut se défendre de l’âpre tourment et des angoisses assez longtemps pour que je voie, madame, la lumière de vos beaux yeux éteinte par l’effet des dernières années,

Et les cheveux d’or fin devenir d’argent ; si je vous vois laisser les guirlandes et les vêtements de couleur claire ; et si je vois se décolorer votre visage qui, dans mon malheur, me rend timide et paresseux à me plaindre,