II
NAPÉ
À une époque très éloignée, vivait un vénérable vieillard, appelé Napi ou Napé, c’est-à-dire le Sage, qui avait trois fils.
Les deux plus âgés s’appelaient, l’un Piéganiw (Pillageur), l’autre Kaïna (Homme de sang). Mais le troisième ne s’étant jamais distingué à la chasse, à la guerre ou à la maraude, comme ses aînés, n’avait point encore reçu de nom.
Cette divergence fut cause que le jeune fils était un objet de mépris pour ses aînés. Du mépris à la haine, il n’y a qu’un pas ; de sorte que l’infortuné jeune homme, sans nom et sans mérite, voyait l’horizon de son avenir s’ouvrir bien noir à ses yeux.
Il ne put s’empêcher de se plaindre de son triste sort à son père, qui, touché de pitié, résolut de tirer son jeune enfant de l’opprobre où sa nullité le plaçait aux yeux de ses aînés.
Comme le vieillard était un médecin très habile et très redouté, il frotta de charbon les pieds de son jeune fils, et, par cette médecine forte, le rendit invulnérable en même temps que