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[1652] MÉMOIRES

lui offrir sa place. Il n’en témoigna pourtant aucun ressentiment ; mais en sortant il dit à la marquise de Sévigné que si ce n’eût point été chez elle, il eût appris à Tonquedec à se mettre à son devoir. La marquise dit au duc de Rohan qu’elle étoit au désespoir que Tonquedec eût fait cette impertinence chez elle, et qu’elle le prieroit de n’y venir plus ; de quoi le duc de Rohan la remercia, et s’en alla. Le jeudi suivant, le duc de Rohan passant devant la porte de la marquise de Sévigné, y vit le carrosse du comte Du Lude, et demanda au cocher si son maître étoit là ; il lui dit que non, mais que c’étoit M. de Tonquedec, à qui il avoit prêté son carrosse. Le duc de Rohan avoit avec lui plusieurs gentilshommes qu’il laissa en bas, et monta seul. La marquise de Sévigné le voyant fut fort interdite ; et le duc de Rohan, après l’avoir saluée, dit à Tonquedec : « On m’a dit que vous vous vantiez de m’avoir morgué céans ; je viens aujourd’hui pour vous apprendre à me rendre ce que vous me devez. » Tonquedec répondit : « Monsieur, je vous rendrai toujours plus que je ne vous dois. » À quoi le duc répliqua : « Vous ne sauriez, et je vous montrerai bien ce que vous me devez. » Sur cela la marquise de Sévigné qui se voyoit seule, et qui jugeoit à quoi ces paroles les alloient engager, cria plusieurs fois à Tonquedec qu’il s’en allât, et qu’il sortît de chez elle. « Madame, lui dit Rohan, voulez-vous tout de bon qu’il en sorte ? — Oui, monsieur, répliqua-t-elle.  — Il est juste que vous soyez obéie, dit Rohan ; » et en même temps il le poussa dehors. M. d’Orléans et M. le prince ayant su ce démêlé, demandèrent au duc de Rohan sa parole qu’il ne se battroit point. Il ne