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avis, chacun selon leur caprice ; mais en cette première séance on ne prononça point d’arrêt. Le père fut conduit deux ou trois fois de l’hôtel-de-ville chez le prince de Conti, pour donner quelque mine à l’instruction de son procès, et toujours à pied, traîné par cinq ou six pendards, qui étoient suivis de plus de cinq cents ormistes armés de fusils et de hallebardes, d’une infinité d’orangères, de fruitières, de servantes et de petits enfans, qui crioient tous : Il faut qu’il meure ! Après trois ou quatre voyages de cette manière, il fut conduit dans le sénat de l’Ormée, qu’ils avoient ce jour-là baptisé du nom de conseil de guerre, où on lui prononça une sentence donnée sans formes, sans procédures, par des non-juges, par des personnes récusées, par une assemblée composée d’huguenots, de criminels, de gens sans nom et sans caractère.

Avant l’exécution de cette sentence on rasa ce bon religieux, on lui ôta sa marque de prêtre, on le dépouilla de ses habits ; et lui ayant fait mettre la corde au col par l’exécuteur de justice, on le mit sur une charrette, et on le traîna de la sorte, la torche au poing et le bourreau qui étoit derrière, dans toutes les rues de Bordeaux ; et après on le remit dans un cachot, où il étoit condamné de demeurer toute sa vie au pain et à l’eau.

Depuis la prise du père Ithier jusqu’à l’exécution de sa sentence, le père Berthod ne bougea de Bordeaux, d’où il écrivit à la Reine et à M. le cardinal tout ce qui se passoit, et n’en vouloit point partir qu’il n’eût vu ce qu’il deviendroit. Le père Berthod trouva la difficulté bien grande de sortir ; car il n’y avoit que la porte du Chapeau-Rouge ouverte, encore