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[1652] MÉMOIRES

part de ceux qu’il croyoit auteurs de cette sédition, il pourroit contribuer en quelque chose à la faire cesser ; joint qu’ayant sa femme malade dans l’hôtel-de-ville, et qui ne pouvoit plus souffrir la fumée dont elle étoit étouffée dans sa chambre, il voulut voir s’il pourroit donner quelque ordre ou à adoucir les mutins, ou à faire transporter sa femme ; mais dès qu’il eut mis le pied sur le seuil de la porte, il reçut plusieurs coups de baïonnettes, dont il fut très-long-temps à guérir. Il fut obligé de donner de l’argent à quelques uns pour se garantir de la mort ; et tant de ce qu’il déboursa pour cela qu’en ce qu’il perdit dans le tumulte, on fait état qu’il lui coûta plus de mille francs, outre ses blessures, le danger où il fut de sa vie, et sa femme de la sienne, par la frayeur et l’incommodité qu’elle ressentit de tous ces désordres.

Le curé de Saint-Jean ayant été fort harcelé, et même blessé à la tête en voulant exhorter les attaquans à surseoir à leurs violences, tomba en syncope. Son vicaire, qui étoit à l’église, ayant su le péril où étoit son curé et tous les autres, prit sur l’autel le sacrement[1], et le porta jusqu’au portail de l’hôtel-de-ville ; mais comme il vit que l’on n’y portoit aucun respect, de peur de quelque accident funeste, il le reporta. Quelques uns ont dit qu’il le rapporta encore une autre fois, mais avec aussi peu d’effet ; et qu’il y avoit eu des soldats assez inconsidérés et assez impies pour coucher en joue le vicaire, sur lequel on croit qu’ils eussent tiré s’il ne se fût retiré.

Duhamel, curé de Saint-Médéric, homme fort zélé

  1. Le sacrement : Conrart ne dit point le saint-sacrement, parce qu’il étoit protestant.