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[1652] MÉMOIRES

parce qu’il ne vouloit pas que le duc de Beaufort sût que lui et M. le prince traitoient avec la cour, que parce qu’il jugeoit qu’il leur seroit avantageux que l’on tînt toujours le peuple bien animé pour eux, pour obliger le cardinal à passer par tout ce qu’ils voudroient. On disoit aussi que le duc de Beaufort faisoit tout ce vacarme depuis qu’il avoit découvert que les deux princes traitoient sans lui ; et qu’enfin ils lui avoient promis de demander quarante mille écus pour la duchesse de Montbazon, dont il faisoit le galant. Elle se moquoit pourtant de lui, quoique en apparence elle fît mine de l’estimer beaucoup. Pour montrer quel galant c’est, je rapporterai une galanterie qu’il lui dit un jour, en voulant se mettre en carrosse auprès d’elle à une portière. Avant que de monter, il lui dit : « Madame, j’ai toujours ouï dire que les femmes ont une cuisse plus douce que l’autre ; je vous supplie de me dire laquelle des vôtres est la plus douce, afin que je me mette de ce côté-là. » Ce qui fit rire toute la compagnie, à force d’être ridicule.

Le cardinal de Retz s’apercevant que le duc d’Orléans se refroidissoit pour lui, et s’échauffoit fort pour M. le prince, voulut s’éclaircir de l’assiette où étoit son esprit. Un jour qu’il étoit seul avec lui, il lui demanda si Son Altesse Royale savoit bien que M. le prince traitoit avec la cour ? Il lui répondit seulement : « Oui, je le sais bien. — Mais savez-vous que son traité est bien avancé ? ajouta le cardinal de Retz. — Oui, je sais cela aussi, répondit le duc d’Orléans. — Oserois-je donc demander à Votre Altesse Royale, continua le cardinal, si c’est