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prince, qui fut, averti de son dessein, et qui fut au milieu de ses quartiers avant qu’il eût eu la première nouvelle de sa démarche. Il ne s’ébranla pas néanmoins : il se posta sur une hauteur, sur laquelle on ne pouvoit aller que par un défilé. On passa presque tout le jour à escarmoucher, pendant que M. le prince attendoit trois canons qu’il avoit mandés d’Agen. Il en avoit un pressant besoin : car il n’avoit en tout avec lui, en comptant les troupes de M. le prince de Conti, que cinq cents hommes de pied et deux mille chevaux, tous gens de nouvelle levée. La foiblesse ne donne pas, pour l’ordinaire, la hardiesse : celle de M. le prince fit plus en cette occasion, car elle lui donna de la vanité ; et c’est, je crois la seule fois de sa vie qu’il en a eu. Il se ressouvint que la frayeur que sa présence pourroit inspirer aux ennemis les pourroit ébranler. Il leur renvoya quelques prisonniers, qui leur rapportèrent qu’il étoit là en personne. Il les chargea en même temps : ils plièrent d’abord ; et on peut dire qu’il les renversa moins par le choc de ses armes que par le bruit de son nom. La plupart de l’infanterie se jeta dans Miradoux, où elle fut assiégée incontinent. Les régimens de Champagne et de Lorraine, que M. le prince ne vouloit recevoir qu’à discrétion, défendirent cette méchante place avec une valeur incroyable, et ils donnèrent le temps à M. le comte d’Harcourt de la secourir. M. le prince envoya son artillerie et ses bagages à Agen ; il mit des garnisons dans quelques petites places qui pouvoient incommoder les ennemis ; et ensuite sur le soir il se rendit lui-même à Agen, ayant avec lui messieurs de La Rochefoucauld, de Marsin et de