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nier point, et plus susceptible de vanité pour toutes sortes d’intrigues sans exception, que femme que j’aie jamais connue. Celle dans laquelle je lui proposai ce jour-là de me rendre de bons offices étoit d’une nature à effaroucher d’abord une prude. J’assaisonnai mon discours de tant de protestations, de bonnes intentions et d’honnêtetés, qu’il ne fut pas rebuté ; mais aussi ne fut-il reçu que sous les promesses solennelles que je fis de ne prétendre jamais qu’elle étendît les services que je lui demandois au delà de ceux que l’on peut rendre en conscience pour procurer une bonne, chaste, pure et sainte amitié. Je m’engageai à tout ce qu’on voulut. On prit mes paroles pour bonnes, et l’on se sut même très-bon gré d’avoir trouvé une occasion toute propre à rompre dans la suite le commerce que j’avois avec madame de Pommereux, que l’on ne croyoit pas si innocent. Celui dans lequel je demandai que l’on me servît ne devoit être que tout spirituel et tout angélique ; car c’étoit celui de mademoiselle de La Loupe[1], que vous avez vue depuis sous le nom de madame d’Olonne. Elle m’avoit fort plu quelques jours auparavant, dans une petite assemblée qui s’étoit faite dans le cabinet de Madame ; elle étoit jolie, précieuse par son air et par sa modestie. Elle logeoit tout proche de madame de La Vergne ; elle étoit amie intime de mademoiselle sa fille ; elle avoit même percé une porte par laquelle elles se voyoient sans sortir du logis. L’attachement que M. le chevalier de Sévigné avoit pour moi, l’habitude que j’avois dans

  1. Catherine-Henriette d’Angennes, fille aînée de Charles d’Angennes, baron de La Loupe. Elle devint fameuse par ses galanteries, et c’est l’une des héroïnes de l’Histoire amoureuse des Gaules. (A. E.)