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dans le devoir ceux qui auroient quelque pensée de révolte, elle peut aussi lui être pernicieuse, en ce qu’elle ôte toute espérance de pardon à ceux qui se sont révoltés. En effet il est malaisé de comprendre comment ces politiques qui passoient pour avoir de l’habileté, n’appréhendèrent pas de désespérer par cet exemple Hiérôme de Fiesque qui tenoit encore la Roque de Notombio, qu’il pouvoit mettre entre les mains des étrangers, et dont la perte étoit d’une extrême importance à la ville de Gênes. Mais si ceux dont nous venons de parler firent des fautes remarquables en cette occasion, nous pouvons dire que les conjurés en firent encore de plus grandes après qu’ils eurent perdu leur chef. Sa valeur et sa bonne conduite, qui étoient comme les suprêmes intelligences de tous les mouvemens de son parti, venant à manquer par sa mort, il tomba tout à coup dans un désordre qui acheva de le ruiner. Hiérôme de Fiesque, qui par beaucoup de raisons, étoit obligé de cacher la mort de son frère, fut le premier à la publier, et par cette nouvelle il redonna cœur aux ennemis, et jeta l’épouvante dans l’esprit des siens. Ottobon, Verrina, Calcagno et Sacco, qui s’étoient sauvés sur la galère, remirent en liberté presque au sortir de Gênes, les prisonniers qu’ils avoient entre leurs mains, sans prévoir qu’ils leur pourroient être nécessaires pour leur accommodement. Verrina ayant appris la mort du comte, se retira dans sa galère, et abandonna lâchement une affaire de cette importance à la conduite de Hiérôme, qui n’avoit ni assez d’expérience ni assez d’autorité parmi les conjurés pour l’achever. Ce même Hiérôme fit un traité avec le sénat, et consentit à rentrer dans la condition d’un particulier, après s’être vu sur le point de se rendre souverain. Il fit ensuite une capitulation honteuse dans Montobio, sur la parole de ceux qui lui en avoient déjà manqué. Verrina, Calcagno et Sacco, les principaux ministres de cette conjuration, et les plus criminels de tous les complices du comte, le portèrent à cette bassesse sur l’espérance qu’on leur donna de l’impunité, aimant mieux s’exposer à mourir par la main d’un bourreau que de périr honorablement sur une brèche.

Ainsi finit cette grande entreprise : ainsi mourut Jean-Louis de Fiesque, comte de Lavagne que les uns honorent de grands éloges,