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Et le nôtre, faisoient tricon.
    Ce même jour, par une lettre,
Toulouse nous faisoit promettre
Que nous pouvions tenir pour hoc
Le parlement de Languedoc,
Qui se déclaroit pour le nôtre :
Tellement qu’avec que cet autre
C’étoit un quatorze bien fait.
    Le samedi[1] ni beau ni laid,
Ni chaud ni froid. À l’audience
Nos généraux prirent séance,
Et là dirent tous d’une voix
Qu’ils avoient donné cette fois
Des propositions à faire :
Mais qu’ils l’avoient cru nécessaire,
Monsieur le cardinal resté,
Pour avoir plus de sûreté,
Sachant bien qu’homme d’Italie
Jamais une offense n’oublie.
Qu’au contraire ils étoient tous prêts
D’abandonner leurs intérêts,
S’il lui plaisoit faire voyage :
Sinon, que pour un témoignage
Qu’ils seroient toujours serviteurs
De nos illustres sénateurs,
Ils s’en rapportoient à ces juges,
Protestant que dans nos grabuges
Ils avoient armé seulement
Pour le public soulagement.
    Ce jour, ordonnance royale,
Dessus la plainte générale
Qu’avoient faite nos échevins,
Qui n’étoient pas des quinze-vingts,
Voulut qu’on nous donnât des vivres,
Pain et vin, de quoi nous rendre ivres,
Et boire en diable à la santé
De Sa Chrétienne Majesté,
De toutes parts, par eau, par terre,
Librement comme avant la guerre,
Le commerce étant rétabli,
Et le reste mis en oubli :
Bonne nouvelle pour la pance.
    Lundi vingt et deux, en l’absence
Du vaillant prince de Conti
Que la fièvre avoit investi,
Le coadjuteur en sa place
Vint au parlement, de sa grâce,
Dire que le jour précédent
L’archiduc, homme fort prudent,
Écrivit au prince malade
Qu’ayant fait une cavalcade
Et dit au maréchal Praslin :
Je suis sur ta terre, vilain ;
Pour ôter toute défiance
Qu’il voulut envahir la France,
Il étoit prêt de retourner,
Si la Reine, pour terminer
Les différens des deux couronnes
Voulait nommer quelques personnes.
Et dit notre frondant pasteur
Que Conti prenant fort à cœur
L’occasion avantageuse
De conclure une paix heureuse,
Avoit à Ruel député
Pour derechef être insisté
Sur ce que l’archiduc propose,
Qui méritoit bien une pose.
Et qu’il conjurait notre cour,
Par son zèle et par son amour,
De peser un peu cette affaire,
Et la paix qu’elle pouvoit faire ;
Qu’il étoit toujours prêt, pour lui,
D’abandonner dès aujourd’hui
Tout ce qu’il avoit pu prétendre,
Si messieurs y vouloient entendre.
Qu’au contraire si Léopol,
Par supercherie ou par dol,
Venoit pour pêcher en eau trouble
(Dont j’aurois parié le double),
Il déclaroit dès à présent

  1. 20 mars.