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belle et superbe maison qui est au marquis Nicolini, son parent proche. J’en partis le lendemain au matin d’assez bonne heure, pour aller coucher à Lambrosiano, qui est un lieu de chasse où le grand duc étoit depuis quelques jours. Il me fit l’honneur de venir au devant de moi à une lieue de là jusqu’à Empoli, qui est une assez jolie ville ; et le premier mot qu’il me dit, après le premier compliment, fut que je n’avois pas trouvé en Espagne les Espagnols de Charles-Quint. Comme il m’eut mené dans mon appartement à Lambrosiano, et que je me vis dans ma propre chambre dans un fauteuil au dessus de lui, je lui demandai si je jouois bien la comédie. Il ne m’entendoit pas d’abord ; mais comme il eut connu que je lui voulois marquer par là que je ne me méconnoissois pas moi-même, et que je ne prenois pas la main sur lui sans y faire au moins la réflexion que je devois, il me dit : « Vous êtes le premier cardinal qui m’ait parlé ainsi ; vous êtes aussi le premier pour qui je fasse ce que je fais sans peine. » Je demeurai trois jours avec lui à Lambrosiano et le second, il entra dans ma chambre tout ému, en me disant : « Je vous apporte une lettre du duc d’Arcos, vice-roi de Naples, qui vous fera voir l’état où est le royaume de Naples. « Cette lettre portoit que M. de Guise y étoit descendu ; qu’il y avoit eu un grand combat auprès de la tour des Grecs ; qu’il espéroit que les Français ne feroient point de progrès ; qu’au moins les gens de guerre le lui faisoient espérer ainsi. « Car comme disoit le vice-roi, jo non soi soldato je suis obligé de m’en rapporter à eux. » La confession, : comme vous voyez, est assez plaisante pour un vice-roi. Le