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point espérer de M. le duc de Noirmoutier tout ce qui me conviendroit peut-être dans les suites ; mais je n’ignorois pas non plus qu’étant le maître dans Mézières comme je l’y étois, et m’y rendant en personne, il n’étoit pas impossible que je n’engageasse M. de Noirmoutier, qui enfin gardoit les apparences avec moi ; et qui même, aussitôt qu’il eut appris ma liberté, m’avoit dépêché un gentilhomme en commun avec le gentilhomme de Lameth, pour m’offrir retraite dans leurs places. Mes amis ne doutoient pas que je ne la trouvasse, et même très-sûre, dans Mézières. Ils craignoient qu’elle ne fût pas de la même nature dans : Charleville et comme la situation de ces places fait que l’une sans l’autre n’est pas fort considérable, ils crurent que, vu la disposition de M. de Noirmoutier, je ferois mieux de n’y faire aucun fondement pour ma retraite. Je répète encore ici ce que je vous ai déjà dit, que je ne sais s’il n’y eût pas eu lieu de mieux espérer, non pas de la bonne intention de Noirmoutier, mais de l’état où il se fût trouvé lui-même. Le conseil de mes amis l’emporta sur mes vues : ils me représentèrent que l’asyle naturel d’un cardinal et d’un évêque persécuté étoit le Vatican ; mais il y a des temps dans lesquels il n’est pas malaisé de prévoir que ce qui devroit servir d’asile peut facilement devenir un lieu d’exil. Je le prévis, et je le choisis. Quelque événement que ce choix ait eu je ne m’en suis jamais repenti parce qu’il eut pour principe la déférence que je rendis au conseil de ceux à qui j’avois obligation. Je l’estimerois davantage s’il avoit été l’effet de ma modération et du désir de m’employer à mon rétablissement par les voies ecclésiastiques.