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mise ; j’y avois une contusion terrible. La fièvre me prit sur les neuf heures du soir, et l’altération qu’elle me donnoit étoit encore cruellement augmentée par la chaleur du foin nouveau. Quoique je fusse sur le bord de la rivière, je n’osois boire ; parce que si nous fussions sortis de la meule, Montet et moi, nous n’eussions eu personne pour raccommoder le foin qui eût paru remué, et qui eût donné lieu par conséquent à ceux qui couroient après moi d’y fouiller. Nous n’entendions que des cavaliers qui passoient à droite et à gauche : nous reconnûmes même Coulon à sa voix. L’incommodité de la soif est incroyable et inconcevable à qui ne l’a pas éprouvée. M. de La Poise Saint-Offange, homme de qualité du pays, que M. de Brissac avoit averti en passant chez lui, vint sur les deux heures après minuit me prendre dans cette meule, après qu’il eut remarqué qu’il n’y avoit plus de cavaliers aux environs. Il me mit sur une civière à fumier, et il me fit porter par deux paysans dans la grange d’une maison qui étoit à lui, à une lieue de là. Il m’y ensevelit encore dans le foin ; mais comme j’y avois de quoi boire, je m’y trouvai mieux.

M. et madame de Brissac me vinrent prendre au bout de sept ou huit heures, avec quinze ou vingt chevaux ; et ils me menèrent à Beaupréau, où je trouvai l’abbé de Belebat qui les y étoit venu voir, et où je ne demeurai qu’une nuit, jusqu’à ce que la noblesse fût assemblée. M. de Brissac étoit fort aimé dans tout le pays ; il mit ensemble, dans ce peu de temps, plus de deux cents gentilshommes. M. de Retz, qui l’étoit encore plus dans son quartier, rejoignit à quatre lieues de là avec trois cents. Nous