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point en défense. M. le prince se fût rendu maître du cloître sans coup férir, et j’eusse pu être à la porte de la ville avant qu’il y eût eu une alarme assez forte pour s’y opposer. Rien n’étoit mieux imaginé : Monsieur, qui eût été atterré du coup, y eût donné des éloges. L’hôtel-de-ville, auquel M. le prince en eût donné part sur l’heure même, en eût tremblé. La douceur avec laquelle M. le prince m’auroit traité auroit été louée et admirée. Il y auroit eu un grand déchet de réputation pour moi, à m’être laissé surprendre : comme en effet j’avoue qu’il y auroit eu beaucoup d’imprudence et de témérité à n’avoir pas prévu ce possible. La fortune tourna contre M. le prince ce beau dessein, et elle lui donna le succès le plus funeste que la conjuration la plus noire eût pu produire.

Comme la sédition avoit commencé vers la place Dauphine par des poignées de paille que l’on forçoit tous les passans de mettre à leur chapeau, M. de Cumont, conseiller au parlement et serviteur particulier de M. le prince, qui y avoit été obligé comme les autres qui avoient passé par là, alla en grande diligence au Luxembourg pour en avertir Monsieur, et le supplier d’empêcher que M. le prince, qui étoit dans la galerie, ne sortît dans cette émotion : laquelle apparemment, dit Cumont à Monsieur, est faite ou par les mazarins, ou par le cardinal de Retz, pour faire périr M. le prince. Monsieur courut aussitôt après monsieur son cousin, qui descendroit le petit escalier pour monter en carrosse et pour venir chez moi, et y exécuter son dessein. Il le retint par autorité, et même par force : il le fit dîner avec lui, et il le mena ensuite à l’hôtel de-ville où l’assemblée, dont je vous ai parlé se devoit