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DU CARDINAL DE RETZ. [1649]

les autres. Il eut bon marché de M. d’Elbœuf il donna des lueurs au maréchal de La Mothe de lui faire trouver des accommodemens touchant le duché de Cardonne. Enfin je connus, le jour que nous nous assemblâmes M. de Beaufort, M. de Bouillon le maréchal de La Mothe et moi, que le catholicon[1] d’Espagne n’avoit pas été épargné dans les drogues qui se débitèrent dans cette conversation. Tout le monde m’y parut persuadé que la désertion des troupes de M. de Turenne ne nous laissoit plus de choix pour le parti qu’il y avoit à prendre, et que l’unique étoit de se rendre, par le moyen du peuple, les maîtres du parlement et de l’hôtel-de-ville. Je vous ennuierois, si je rebattois ici les raisons que j’alléguai contre ce sentiment. M. de Bouillon ayant perdu l’armée d’Allemagne, et ne se voyant plus par conséquent assez de considération pour tirer de grands avantages du côté de la cour, ne craignoit plus de s’engager pleinement avec l’Espagne. Il ne voulut point concevoir ce que je disois ; mais j’emportai messieurs de Beaufort et de La Mothe auxquels je fis comprendre qu’ils ne trouveroient pas une bonne, place dans le parti, qui seroit réduit dans quinze jours à dépendre du conseil d’Espagne. Le maréchal de La Mothe n’eut aucune peine de se rendre à mon sentiment mais comme il savoit que don Francisce Pizarro étoit parti la veille pour aller trouver M. de Longueville, avec qui il étoit intimement lié, il ne s’expl-

  1. On a appelé catholicon d’Espagne, du temps de la Ligue, les intrigues de la cour d’Espagne, qui, sous un prétexte de religion et de bien public, entretenoit en France l’animosité des ligueurs. Catholicon d’Espagne ici signifie particulièrement l’argent d’Espagne. (A. E.)