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pour ma personne, l’obligeoient à me dire que Gourville et La Roche-Courbon, domestique de M. de La Rochefoucauld et major de Damvilliers, avoient failli à m’assassiner[1] la veille sur le quai qui est vis-à-vis du pont Bourbon. Je remerciai, comme vous pouvez juger, M. Talon, pour qui effectivement je conserverai jusqu’au dernier soupir une tendre reconnoissance ; mais l’habitude que j’avois à recevoir des avis de cette nature fit que je n’y fis pas toute la réflexion que je devois faire et au nom et au mérite de celui qui me le donnoit, et que je ne laissai pas d’aller le lendemain au soir chez madame de Pommereux seul dans mon carrosse, et sans autre suite que celle de deux pages et trois ou quatre laquais. M. Talon revint chez moi le lendemain matin ; et après qu’il m’eut témoigné de l’étonnement du peu d’attention que j’avois fait sur son premier avis, il ajouta que ces messieurs m’avoient encore manqué d’un quart d’heure la veille auprès des Blancs-Manteaux, sur les neuf heures du soir, qui étoit justement l’heure que j’étois sorti de chez madame de Pommereux. Ce second avis, qui me parut plus particularisé que l’autre, me tira de mon assoupissement. Je me tins sur mes gardes, je marchai en état de n’être pas surpris. Je m’informai par M. Talon même de tout le détail. Je fis arrêter et interroger La Roche-Courbon, qui déposa devant le lieutenant criminel que M. de

  1. Avoient failli m’assassiner : Il n’étoit pas question d’assassinat. Le prince de Condé avoit chargé Gourville et La Roche-Courbon d’enlever le coadjuteur, et de le conduire à Damvilliers. Le hasard seul fit manquer cette entreprise, dont les détails fort curieux se trouvent dans les Mémoires de Gourville.