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ner à eux-mêmes celui de s’évader. La fortune favorisa mon intention. Le vicomte d’Autel, que l’on chercha, ne se trouva point. Monsieur s’amusa à une médaille que Bruneau lui apporta tout à propos ; et j’eus le temps de mander à M. de Turenne, par Varennes qui me tomba sous la main comme par miracle, de se sauver sans y perdre un moment. Le vicomte d’Autel manqua ainsi les deux frères de deux ou trois heures. Le chagrin de Monsieur n’en dura guère davantage ; je lui dis la chose comme elle s’étoit passée, cinq ou six jours après, l’ayant trouvé de bonne humeur. Il ne m’en voulut point de mal : il eut même la bonté de me dire que si je m’en fusse ouvert à lui dans le temps, il eut préféré à son intérêt celui que j’y avois, sans comparaison plus considérable par la raison du secret qui m’avoit été confié. Et cette aventure ne nuisit pas, comme vous pouvez croire, à serrer la vieille amitié qui étoit entre M. de Turenne et moi.

Vous avez déjà vu, en plus d’un endroit de cette histoire, que celle que M. de La Rochefoucauld avoit pour moi n’étoit pas si bien confirmée. Voici une marque que j’en reçus, qui mérite de n’être pas omise. M. Talon, qui est présentement secrétaire du cabinet, et qui étoit dès ce temps-là attaché aux intérêts du cardinal, entra un matin dans ma chambre comme j’étois au lit ; et après m’avoir fait un compliment et s’être nommé (car je ne le connoissois seulement pas de visage), il me dit que bien qu’il ne fût pas dans mes intérêts, il ne pouvoit pas s’empêcher de m’avertir du péril où j’étois ; que l’horreur qu’il avoit pour les mauvaises actions, et le respect qu’il avoit