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[1649] MÉMOIRES

ils maltraitèrent, en pleine rue, un valet de pied du Roi. Les chansons n’épargnoient pas toujours Dieu. Ces folies me donnoient de la peine. Le premier président les savoit bien relever ; les ecclésiastiques s’en scandalisoient ; le peuple ne les trouvoit nullement bonnes : je ne les pouvois ni couvrir ni excuser, et elles retomboient nécessairement sur la Fronde. Voici l’étymologie du mot de Fronde, que j’avois omis dans le premier livre de cet ouvrage.

Quand le parlement commença à s’assembler pour les affaires publiques, M. le duc d’Orléans et M. le prince y vinrent assez souvent, comme vous avez vu, et y adoucirent même les esprits. Ce calme n’y étoit que par intervalle. La chaleur revenoit au bout de deux jours.

Bachaumont s’avisa de dire un jour, en badinant, que le parlement faisoit comme les écoliers qui frondent dans les fossés de Paris, qui se séparent dès qu’ils voient le lieutenant civil, et qui se rassemblent quand il ne paroît plus. Cette comparaison fut trouvée assez plaisante : elle fut célébrée par les chansons, et elle refleurit particulièrement, lorsque la paix étant faite entre le Roi et le parlement, on trouva lieu de l’appliquer à la faction de ceux qui ne s’étoient pas accommodés avec la cour. Nous y donnâmes nous-mêmes assez de cours, parce que nous remarquâmes que cette distinction de nom échauffoit les esprits ; et nous résolûmés dès ce soir de prendre des cordons de chapeaux qui eussent quelque forme de frondes. Un marchand affidé nous en fit quantité, qu’il débita à une infinité de personnes qui n’y entendoient aucune finesse ; et nous n’en portâmes que les derniers, pour