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ne pouvoient être, me dit-elle à moi-même, que d’un homme coupable.

J’allai le soir chez elle, par le commandement de Monsieur : mais je ne lui fis, pour mon particulier, aucune apologie. Je supposai qu’elle ne pouvoit avoir oublié ce que je lui avois, par avance ; toujours premis de faire en cette occasion. Elle s’en ressouvint avec bonté, et me dit positivement qu’elle ne pouvoit se plaindre de moi ; et je connus clairement qu’elle parloit du cœur. Madame la palatine, qui étoit présente à la conversation, dit à la Reine « Que ne feroit point la sincérité dans la conduite d’un fils de France, puisque dans celle d’un coadjuteur de Paris aussi contraire à votre volonté elle oblige Votre Majesté de la louer ? » Madame la palatine n’oublia rien pour faire connoître à la Reine qu’elle ne devoit pas attendre les remontrances du parlement pour éloigner les sous-ministres, parce qu’il seroit plus de sa dignité de les prévenir ; mais elle ne put rien gagner sur son esprit ou plutôt sur son aigreur, qui en de certains momens lui tenoit lieu de tout. Le maréchal d’Estrées m’a dit depuis qu’il y avoit encore quelque chose de plus que son aigreur, et que Chavigny la flattoit qu’il pouvoit obliger M. le prince à souffrir que l’on expliquât l’arrêt. Ce qui me fait croire que le maréchal d’Estrées avoit raison est que je sais, de science certaine, que le même Chavigny pressa en ce temps-là le premier président de biaiser un peu sur les remontrances. Sur quoi la réponse de celui-ci fut remarquable, et digne d’un grand magistrat « Vous avez étén monsieur, l’un de ceux qui ont le plus poussé ces messieurs ; vous