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toit permis d’être d’un autre sentiment que Votre Altesse Royale. »

Cette question fut agitée avec chaleur. Je soutins mon opinion, par l’impossibilité qui me paroissoit au succès d’une négociation dans laquelle, par une rencontre assez bizarre, tous les négociateurs se trouvoient avoir éminemment, au moins pour cette occasion très-épineuse en elle-même, toutes les qualités les plus propres à rompre l’accommodement du monde le plus facile. Monsieur demeura dans son sentiment, parce que sa foiblesse naturelle lui faisoit toujours voir ce qu’il appréhendoit comme infaillible et même proche. Ce fut à moi de céder, ainsi que vous le pouvez croire, et de recevoir l’ordre qu’il me donna de faire dire dès l’après-dînée à la Reine, par madame la palatine, que son sentiment étoit que Sa Majesté s’accommodât en toutes manières avec M. le prince ; et que le parlement et le peuple étoient si échauffés contre tout ce qui avoit quelque teinture du mazarinisme, qu’il ne falloit plus songer qu’à applaudir à celui qui a été assez habile, me dit-il même avec aigreur, pour nous prévenir à recommencer l’escarmouche contre le Sicilien.

J’eus beau lui représenter que, supposé même pour sûr ce qu’il croyoit très-proche, et ce que je tiendrois fort éloigné si j’osois le contredire, le parti qu’il prenoit avoit des inconvéniens terribles, et particulièrement celui de précipiter la Reine dans la résolution que l’on craignoit, et même de l’obliger à prendre encore plus de mesures contre le ressentiment de Monsieur : il crut que les raisons que je lui alléguois n’étoient que des prétextes pour couvrir la véritable <referenles/>