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[1651] MÉMOIRES

botte est belle, vous l’entendez mieux que nous. » J’avois bien dit à M. le prince qu’il falloit faire taire ce coquin de Montardé. Comme il ne se tut pourtant point, je continuai aussi de mon côté à écrire et faire écrire. Portail, avocat au parlement et habile homme, fit en ce temps-là la Défense du Coadjuteur, qui est d’une très-grande éloquence. Sarazin[1], secrétaire de M. le prince de Conti, fit contre moi la Lettre du Marguillier au Curé, qui est une fort belle pièce. Patru[2], bel esprit et fort poli, y répondit par une Lettre du Curé au Marguillier, qui est très-ingénieuse. Je composai ensuite le Vrai et le Faux du prince de Condé et du cardinal de Retz, le Vraisemblable, le Solitaire, les Intérêts du temps, les Contre-temps du sieur de Chavigny, le Manifeste[3] de M. de Beaufort en son jargon. Joly[4], qui étoit à moi, fit les Intrigues de la Paix. Le pauvre Montardé s’étoit épuisé en injures, et il est constant que la partie n’étoit pas égale pour l’écriture. Croissy s’entremit pour faire cesser cette escarmouche de plumes. M. le prince la défendit aux siens, même en des termes fort obligeans pour moi. Je fis la même chose,

  1. Sarrazin : Jean-François, auteur de plusieurs poésies qui eurent dans le temps beaucoup de succès, et d’une Histoire de la conjuration de Walstein ; mort en 1654.
  2. Patru : Olivier. Il suivit long-temps le barreau, et se borna ensuite à cultiver les lettres, où il obtint des succès par la pureté de son style. Protégé par Richelieu, il fut l’un des premiers académiciens français. À sa réception, en 1640, il introduisit l’usage de prononcer un discours. Boileau et La Fontaine le consultoient sur leurs ouvrages. Mort très-âgé en 1681.
  3. Cette pièce, que l’on trouve parmi les Œuvres de Saint-Evremont, a pour titre : Apologie de M. de Beaufort. Girard, auteur de la Vie de M. le duc d’Epernon, l’est aussi de cette Apologie. (A. E.)
  4. Guy Joly, conseiller au châtelet auteur des Mémoires. (A. E.)