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DU CARDINAL DE RETZ. [1651]

ne point accepter le ministère, et d’en tirer, si je pouvois, le cardinalat. Je répondis au maréchal Du Plessis que j’étois sensiblement obligé à la Reine, et que, pour lui témoigner ma reconnoissance, je la suppliois de me permettre de la servir sans intérêts ; que j’étois très-incapable du ministère, par toutes sortes de raisons qu’il n’étoit pas même de la dignité de la Reine d’y élever un homme encore tout chaud et tout fumant, pour ainsi parler, de là faction ; que le titre même me rendroit inutile à son service du côté de Monsieur, et encore beaucoup davantage du côté du peuple. C’étoient les deux endroits qui, dans la conjoncture présente, lui étoient les plus considérables. « Mais, reprit tout d’un coup le maréchal Du Plessis, il faut quelqu’un pour remplir la niche tant qu’elle sera vide, M. le prince dira toujours que l’on y veut remettre le cardinal, et c’est ce qui lui donnera de la force. — Vous avez d’autres sujets, lui répondis-je, bien plus propres à cela que moi. » À quoi le maréchal répondit « Le premier président ne seroit pas agréable aux frondeurs ; la Reine ni Monsieur ne se fieront jamais à Chavigny. » Après bien des tours je lui nommai M. de Châteauneuf. Il se récria à ce mot. « Eh quoi ! me dit-il, vous ne savez pas que ce fut lui qui s’opposa à votre chapeau à Fontainebleau ? Vous ne savez pas que ce fut lui qui écrivit ce beau mémorial de sa main, qui fut envoyé à votre honneur et louange au parlement ? » Voilà précisément ou j’ai appris cette dernière circonstance : car je savois déjà la pièce de Fontainebleau. Je répondis au maréchal que je n’étois pas peut-être si ignorant qu’il se l’imaginait ; mais que les temps avoient apporté des