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[1651] MÉMOIRES

me commanda de lui apporter un écritoire qui étoit sur la table de son cabinet ; et elle écrivit ces paroles dans une grande feuille de papier :

« Il est ordonné à M. le coadjuteur de faire prendre les armes et d’empêcher que les créatures du cardinal Mazarin, condamné par le parlement, ne fassent sortir le Roi de Paris.

« Marguerite de Lorraine. »

Monsieur ayant voulu voir cette dépêche, l’arracha des mains de Madame mais il ne put l’empêcher de dire à mademoiselle de Chevreuse : « Je te prie, ma chère nièce, de dire au coadjuteur qu’il fasse ce qu’il faut ; et je lui réponds demain de Monsieur, quoi qu’il dise aujourd’hui. » Monsieur me cria, comme je sortois de la chambre « Au moins, M. le coadjuteur, vous connoissez le parlement ; je ne veux point absolument me brouiller avec lui. » Mademoiselle de Chevreuse tira la porte, en disant : « Je vous défie de vous brouiller autant avec lui que vous l’êtes avec moi. »

Vous jugez aisément de l’état où je me trouvai ; mais je crois que vous ne doutez pas du parti que je pris. Le choix au moins n’en étoit pas embarrassant, quoique l’événement fût bien délicat. J’écrivis à M. de Beaufort ce qui se passoit, et je le priai de se rendre en toute diligence à l’hôtel de Montbazon. Mademoiselle de Chevreuse alla éveiller le maréchal de La Mothe, qui monta à cheval en même temps ; avec tout ce qu’il put amasser de gens attachés à messieurs les princes. Je sais bien que Langues et Coligny furent