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DU CARDINAL DE RETZ. [1650]

toutes les nuits la comédie à elle et à moi. Le prodige est que ce traité de M. de Beaufort demeura très-secret, contre toutes sortes d’apparences ; qu’il ne nuisit à rien, et qu’il ne produisit justement que l’effet que l’on vouloit, qui étoit de faire connoître, à ceux qui gouvernoient à Paris les affaires de M. le prince, que l’unique ressource ne consistoit pas en Mazarin. Un des articles portoit que M. de Beaufort feroit tous ses efforts pour obliger Monsieur à prendre la protection de messieurs les princes, et qu’il romproit même avec le coadjuteur, s’il persistoit dans l’opiniâtreté qu’il avoit témoignée jusque là contre leur service. Madame de Montbazon avoit été négligée dans les derniers temps par la cour, qui n’estimoit ni sa capacité ni sa fidélité, et qui connoissoit son peu de pouvoir. Cette circonstance ne nous fut pas inutile.

Quand madame la palatine eut donné le temps à son parti de se détromper des fausses lueurs dont la cour l’amusoit, et qu’elle eut mis les esprits au point que Monsieur les vouloit, je me laissai pénétrer plus que je n’avois accoutumé à Arnauld et à Viole, qui se pressèrent de lui en apprendre la bonne nouvelle. Croissy fut l’entremetteur de notre entrevue ; elle se fit la nuit chez madame la palatine. Nous conférâmes, nous signâmes le traité ; M. de Beaufort le signa aussi, pour faire voir au parti des princes notre union, et que celui qu’il avoit signé auparavant tout seul n’étoit pas le bon. Nous convînmes que ce traité seroit mis en dépôt entre les mains de Blancménil, qui, tel que vous le connoissez, faisoit en ce temps-là quelque figure, à cause qu’il avoit été des premiers à déclamer dans le parlement contre le cardinal Mazarin. Ce traité est en