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corrompu l’esprit du cardinal à l’égard de la paix générale ; et que le désir que je lui avois témoigné, lorsque je m’étois raccommodé la dernière fois avec lui, d’en être un des plénipotentiaires, lui fit croire que cette proposition étoit un peu jouée, et que j’avois été de concert avec M. de Turenne pour la faire faire à l’archiduc. Il ne l’osa pourtant pas refuser, M. Le Tellier lui ayant mandé que tout Paris se souleveroit, si seulement il y balançoit. Le grand prévôt me dit au retour qu’il savoit, de science certaine, que Servien avoit fait tous les efforts possibles pour l’obliger à ne point envoyer à Monsieur le plein pouvoir, et pour faire qu’il ne se rendît pas, particulièrement sur le point de la conférence personnelle de Monsieur avec l’archiduc.

Les patentes arrivèrent à propos pour les faire voir à don Gabriel de Tolède. Elles donnoient à Monsieur un plein et entier pouvoir de traiter et conclure la paix à telles conditions qu’il trouveroit raisonnables et avantageuses pour le service du Roi et elles lui joignoient, avec subordination, mais cependant aussi avec le titre d’ambassadeurs extraordinaires et plénipotentiaires, messieurs Molé, premier président, et d’Avaux. Vous êtes peut-être surprise de ne me pas trouver en tiers, après les engagemens dont je vous ai parlé ci-dessus. Je le fus aussi, mais je n’éclatai pas, et j’empêchai Monsieur, qui n’en étoit guère moins en colère que moi, de faire paroître ses sentimens : car je ne voulois pas donner la moindre lueur d’aucun intérêt particulier dans les préliminaires d’un bien aussi grand et aussi général que celui de la paix. Je m’en expliquai dans ces termes à tout le monde, et j’ajoutai que