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DU CARDINAL DE RETZ. [1650]

M. le prince, ouvrit l’avis : non qu’il espérât de le faire passer (car il savoit bien que nous étions encore plus forts que lui en nombre de voix) mais pour en tirer l’avantage de nous embarrasser, M. de Beaufort et moi, sur un sujet sur lequel nous n’avions garde de parler, et sur lequel nous ne pouvions pourtant nous taire sans passer en quelque façon pour des mazarins. Le président Viole servit admirablement M. le prince en cette occasion, où Bourdet, brave soldat, qui avoit été capitaine aux gardes, et qui depuis s’attacha à M. le prince, fit une action qui ne lui réussit pas, mais qui donna beaucoup d’audace à son parti. Il s’habilla en maçon avec quatre-vingts officiers de ses troupes qui s’étoient coulées dans Paris ; et ayant ramassé des gens de la lie du peuple auxquels on avoit délivré quelque argent, il vint droit à Monsieur qui sortoit, et qui étoit déjà au milieu de la salle, en criant Point de Mazarin ! vivent les princes ! Monsieur, à cette vision, et à deux coups de pistolet que Bourdet tira en même temps, tourna brusquement, et s’enfuit courageusement dans la grand’chambre, quelques efforts que M. de Beaufort et moi fissions pour le retenir. J’eus un coup de poignard, dans mon rochet ; et M. de Beaufort, ayant fait ferme avec les gardes de Monsieur et nos gens, repoussa Bourdet, et le renversa sur les degrés du Palais. Il y eut deux gardes de Monsieur tués.

Le fracas de la grand’chambre étoit un peu plus dangereux on s’y assembloit presque tous les jours à cause de l’affaire de Foulai, dont je vous ai déjà parlé et il n’y avoit point d’assemblées où on ne donnât des bourrades au cardinal, et où ceux du parti de