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DU CARDINAL DE RETZ. [1650]

en colère contre moi, je lui proposai de prendre le sentiment du premier président. Il y envoya sur-le-champ M. Le Tellier, qui revint très-convaincu de mon opinion, et qui dit nettement à Monsieur que celle du premier président étoit qu’il passeroit du bonnet à entendre le député. Vous remarquerez que lorsque les députés de la compagnie avoient été recevoir les commandemens du Roi à son départ, le garde des sceaux leur avoit dit en sa présence que ce député n’étoit qu’un envoyé des séditieux, et non pas du parlement.

Il se trouva le lendemain que l’avis du premier président étoit bon. Quoique Monsieur eût dit d’abord que le Roi avoit commandé à M. d’Epernon de sortir de la Guienne, et de venir au devant de lui sur son passage, dans la vue de traiter les affaires avec douceur, et d’agir, en père plutôt qu’en roi, il n’y eut pas dix voix à ne pas recevoir le député. On le fit entrer à l’heure même : il présenta la lettre du parlement de Bordeaux ; il harangua, et même avec éloquence ; il mit sur le bureau les arrêts rendus par sa compagnie, et il conclut par la demande de l’union.

On opina deux ou trois jours de suite sur cette affaire et l’on conclut à faire registre de ce que Monsieur avoit dit touchant l’ordre du Roi à M. d’Epernon que le député de Bordeaux donneroit sa créance par écrit, laquelle seroit présentée au Roi par les députés du parlement de Paris, qui supplieroient très-humblement la Reine de donner la paix à la Guienne. La délibération fut assez sage on ne s’emporta point ; mais ceux qui connoissoient le parlement virent clairement, a l’air plutôt qu’aux paroles que celui de