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DU CARDINAL DE RETZ. [1650]

chant avec cinq ou six flambeaux devant moi par les rues. M. de Beaufort s’y promena de même, et l’on, fit partout des feux de joie.

Nous allâmes ensemble chez Monsieur, où nous trouvâmes La Rivière dans la grande salle, qui faisoit bonne mine, et qui racontoit aux assistans le détail de ce qui s’étoit passé au Palais-Royal. Il ne pouvoit pourtant pas, douter qu’il ne fût perdu. Il demanda son congé, et il l’eut ; mais il ne tint pas à M. le cardinal qu’il ne demeurât. Il m’envoya Lyonne sur le minuit, pour me le proposer, et pour me le persuader par les plus méchantes raisons du monde. J’en avois de bonnes pour m’en défendre. Lyonne me dit, il y a cinq ou six ans, que ce mouvement de conserver La Rivière fut inspiré au cardinal par M. Le Tellier, qui appréhenda que les frondeurs ne s’insinuassent dans l’esprit de Monsieur.

La Reine envoya, incontinent après une lettre du Roi au parlement, par laquelle il expliquoit les raisons de la détention de M. le prince, qui ne furent ni fortes ni bien colorées. Nous eûmes notre arrêt d’absolution, et nous allâmes au Palais-Royal, où la badauderie des courtisans m’étonna plus que celle des bourgeois. Ils étoient montés sur tous les bancs des chambres, qu’on avoit apportés au sermon.

Mesdames les princesses eurent ordre de se retirer à Chantilly. Madame de Longueville sortit de Paris pour tirer du côté de la Normandie, où elle ne trouva point d’asyle. Le parlement de Rouen l’envoya prier de sortir de la ville : M. le duc de Richelieu ne la voulut pas recevoir dans le Havre. Elle se retira à Dieppe, où elle ne put pas demeurer long-temps.