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de la conduite qu’il tiendroit aussitôt qu’il seroit libre. Il fut décide que Retz se rendroit sur-le-champ à Paris, au moyen de relais qui seroient disposés sur la route ; qu’il révoqueroit publiquement sa démission, et qu’il prendroit en personne possession de l’archevéché. On ne redoutoit aucun obstacle sérieux de la part du gouvernement, parce qu’on croyoit s’être assuré de l’assistance de la populace ; et le prélat doutoit si peu de son triomphe, qu’il s’exprime ainsi dans ses Mémoires : « Je me serois, dit-il, rendu maître de la capitale et du royaume, en brisant mes fers. » Le chevalier de Sévigné, zélé partisan de Port-Royal, étoit chargé de commander l’escorte.

La première partie de ce plan eut le succès qu’on avoit espéré. Le cardinal de Retz sortit heureusement du château (8 août) ; mais le cheval sur lequel il monta s’étant emporté, il fit une chute, se démit l’épaule, et fut ainsi hors d’état d’aller soulever les Parisiens. Ses amis le transportèrent à Machecoul, où il révoqua sa démission en présence de deux notaires ; et il se réfugia ensuite à Belle-Ile, place qui appartenoit à sa famille. Il n’y fut pas long-temps à l’abri des poursuites, parce que la cour fit marcher des troupes de ce côté ; et, quoique malade, il fut obligé de s’embarquer précipitamment pour l’Espagne.

Arrivé à Saint-Sébastien au commencement de septembre, il obtint de Philippe IV la permission de traverser le royaume pour se rendre à Rome, où il espéroit trouver des protections puissantes. Il fit lentement ce voyage, déguisé en laïque, et sous le nom du marquis de Saint-Florent. Pendant son séjour dans la petite ville de Tudela, il y eut une émotion popu-