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DU CARDINAL DE RETZ. [1649]

cérité de Fuensaldagne, et de la confiance que nous devions prendre en eux : enfin je n’ai jamais rien vu de si sot. Il croyoit déjà gouverner Fuensaldagne. Quel plaisir d’avoir un négociateur de cette espèce, dans une cour où nous devions avoir plus d’une affaire ! Noirmoutier, qui étoit son ami intime, avoua que la lettre étoit impertinente, mais il ne pensa pas qu’elle le rendroit lui-même fort impertinent : car il se mit dans la fantaisie d’aller aussi à Bruxelles, en disant qu’il confessoit qu’il y avoit de l’inconvénient d’y laisser Laigues ; mais qu’il y auroit de la malhonnêteté à le révoquer, et même à lui envoyer un collègue qui ne fût pas son ami particulier, et d’un grade tout-à-fait supérieur au sien. Voilà ce qu’il disoit, voilà ce qu’il pensoit. Il espéroit de se distinguer beaucoup par cet emploi, qui le mettroit dans la négociation sans le tirer de la guerre ; qui lui donneroit toute la confiance du parti à l’égard de l’Espagne, et qui lui donneroit en même temps toute la considération de l’Espagne à l’égard du parti. Nous fimes tous nos efforts pour lui ôter cette pensée : il le voulut absolument, et il le fallut. Il portoit le beau nom de La Trémouille, il étoit lieutenant général, il brilloit dans le parti, il y étoit entré avec moi et par moi. Voilà le malheur des guerres civiles : on y fait souvent des fautes par bonne conduite.

La conférence de Ruel commença aussi mal qu’il se pouvoit. Les députés prétendirent qu’on ne leur tenoit pas la parole qu’on leur avoit donnée de déboucher les passages, et qu’on ne laissoit pas même passer librement les cent muids de blé. La cour soutint qu’elle n’avoit point promis l’ouverture des passages,