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DU CARDINAL DE RETZ. [1649]

Il est pourtant vrai qu’il n’y avoit pas un seul ministre ni un seul courtisan qui n’eût déjà vu des signes infaillibles de la révolution. Il faut avouer que les barricades les devoient convaincre : l’ont-elles fait ? les ont-elles empêchés d’assiéger Paris sur ce fondement que le caprice du peuple, qui l’avoit porté à l’émotion, ne le pourroit pas pousser jusques à la guerre ? Ce que nous faisons aujourd’hui et tous les jours les pourroit détromper de cette illusion : en sont-ils guéris ? Ne dit-on pas tous les jours à la Reine que le gros bourgeois est à elle, et qu’il n’y a dans Paris que la canaille achetée à prix d’argent qui soit au parlement ? Je vous ai marqué la raison pourquoi les hommes se flattent et se trompent eux-mêmes en ces matières. Ce qui est arrivé à la cour arrive présentement au parlement. Il a dans ce mouvement tout le caractère de l’autorité : il en perdra bientôt la substance ; il le devroit prévoir et par les murmures qui commencent à s’élever contre lui, et par le redoublement de la manie du peuple pour M. de Beaufort et moi. Nullement ; il ne le connoitra jamais que par une violence actuelle et positive qu’on lui fera, et que par un coup qui l’abattra. Tout ce qu’il verra de moins lui paroitra une tentative que nous aurons faite contre lui, et dans laquelle nous n’aurons pu réussir. Il en prendra du courage, il nous poussera effectivement si nous plions, et il nous obligera par là à le perdre. Ce n’est pas là notre compte : au contraire notre intérêt est de ne lui point faire de mal pour ne point mettre de division dans notre parti, et d’agir toutefois d’une manière qui lui fasse voir qu’il ne peut faire son bien qu’avec nous. Il n’y a point de moyens plus efficaces, à mon avis,