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[1649] MÉMOIRES

de Bellièvre que pour le coup j’étois la dupe, et que j’avois pris le frivole pour la substance. Le président de Bellièvre, à qui je m’étois ouvert, m’eût pu justifier, s’il l’eût jugé à propos ; mais il fut lui-même la dupe, et il railla le président de Mesmes, comme un homme qui prenoit plaisir à se flatter soi-même.

M. de Bouillon ayant examiné, tout le reste de la nuit jusqu’à cinq heures du matin, le papier que je lui avois laissé à deux, me récrivit le lendemain un billet, par lequel il me prioit de me trouver chez lui à trois heures après-midi. Je ne manquai pas de m’y rendre, et je trouvai madame de Bouillon pénétrée de douleur, parce que monsieur son mari l’avoit assurée que ce que je marquois dans mon écrit n’étoit que trop bien fondé, supposé les faits dont il ne pouvoit pas croire que je ne fusse très-bien informé ; et qu’il n’y avoit à tout cela qu’un remède, que non-seulement je ne prendrois pas, mais auquel même je m’opposerois. Ce remède étoit de laisser agir le parlement pleinement à sa mode, et de contribuer même sous main à lui faire faire des pas odieux au peuple ; de commencer dès cet instant de le décréditer dans le peuple ; de jouer le même personnage à l’égard de l’hôtel-de-ville, dont le chef, qui étoit le président Le Féron, prévôt des marchands, étoit déjà très-suspect ; de se servir ensuite de la première occasion que l’on jugeroit la plus favorable, pour s’assurer, ou par l’exil ou par la prison, des personnes de ceux dont nous ne nous pourrions pas nous répondre à nous-mêmes. Voilà ce que M. de Bouillon nous proposa sans balancer : en ajoutant que Longueil, qui connoissoit mieux le parlement qu’homme du royau-