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DU CARDINAL DE RETZ. [1649]

Ce que nous pouvons, M. de Beaufort et moi, dans le peuple, lui doit faire connoître qu’il nous y doit compter pour quelque chose ; mais ces deux vues ont leurs inconvéniens comme leur utilité. L’union des généraux avec l’Espagne n’est pas assez publique pour jeter dans les esprits toute l’impression qui y seroit dans un sens nécessaire, et qui cependant, si elle étoit plus déclarée, seroit pernicieuse. Cette même union n’est pas assez secrète pour ne pas donner lieu à cette compagnie d’en prendre avantage contre nous dans les occasions, qu’elle prendroit toutefois encore plus tôt, si elle vous croyoit sans protection. Pour ce qui est du crédit que M. de Beaufort et moi avons dans le peuple, il est plus propre à faire du mal au parlement, qu’à l’empêcher de nous en faire. Si nous étions de la lie du peuple, nous pourrions peut-être avoir la pensée de faire ce que Bussy Le Clerc[1] fit au temps de la Ligue, c’est-à-dire d’emprisonner, de saccager le parlement. Nous pourrions avoir en vue ce que firent les Seize quand ils pendirent le président Brisson[2], si nous voulions être aussi dépendans de l’Espagne que les Seize l’étoient. M. de Beaufort est petit-fils de Henri-le-Grand, et je suis coadjuteur de Paris. Ce n’est ni notre honneur ni notre compte ; et cependant il nous seroit plus facile d’exécuter ce que fit Bussy Le Clerc, et ce que firent

  1. Bussy Le Clerc, tireur d’armes, et ensuite procureur au parlement. Il étoit un de ces seize zélés ligueurs dont on voit les noms dans les notes sur la satire Ménippée. Ils furent nommés les Seize, parce qu’ils se distribuèrent dans les seize quartiers de Paris. Dans la suite, Busy Le Clerc se sauva à Bruxelles, et y reprit son métier de tireur d’armes. (A. E.)
  2. Les Seize le pendirent le 15 novembre 1591. (A. E.)