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[1649] MÉMOIRES

puté du plus cruel ennemi des fleurs de lis ? »

Comme nous avions prévu cette tempête, il n’avoit pas tenu à nous d’exposer M. d’Elbœuf à ses premiers coups ; mais il s’en étoit tiré assez adroitement, en disant que la même raison qui l’avoit obligé de rendre compte à son général de la lettre qu’il avoit reçue, ne lui permettoit pas d’en porter la parole en sa présence. Il falloit pourtant de nécessité quelqu’un qui préparât les voies, et qui jetât dans une compagnie, où les premières impressions ont un merveilleux pouvoir, les premières idées de la paix générale et particulière que cet envoyé venoit annoncer. La manière dont son nom frapperoit d’abord l’imagination des enquêtes décidoit du refus ou de l’acceptation de son audience ; et, tout bien pesé et considéré de part et d’autre, l’on jugea qu’il y avoit moins d’inconvénient à laisser croire un peu de concert avec l’Espagne, qu’à ne pas préparer par un canal ordinaire, non odieux et favorable, les drogues que l’envoyé d’Espagne nous alloit débiter. Ce n’est pas que la moindre ombre de concert, dans les compagnies qu’on appelle réglées, ne soit très-capable d’y empoisonner les choses, même les plus justes et les plus nécessaires ; et cet inconvénient étoit plus à craindre en cette occasion qu’en toute autre. J’y admirai le discernement de M. de Bouillon, chez qui la résolution se prit de faire faire l’ouverture par M. le prince de Conti. Il ne balança pas un moment. Rien ne marque tant le jugement solide d’un homme, que de savoir choisir entre les grands inconvéniens. Je reviens au président de Mesmes, qui s’attacha à M. le prince de Conti, et qui se tourna ensuite vers moi, en