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[1649] MÉMOIRES

mari et moi, joints ensemble, emporterions toujours si fort la balance, que les autres ne nous pourroient faire aucune peine.

M. de Bouillon, qui connoissoit très-bien ce que je pensois, et que je parlois selon mes véritables intérêts, revint tout d’un coup à mon avis, par une manière qui devroit être très-commune, et qui est cependant très-rare. Je n’ai jamais vu que lui qui ne contestât jamais ce qu’il ne croyoit pas pouvoir obtenir, il entra même obligeamment dans mes sentimens. Il dit à madame de Bouillon que je jouois le droit du jeu au poste où j’étois ; que la guerre civile pourroit s’éteindre le lendemain ; que j’étois archevêque de Paris pour toute ma vie ; que j’avois plus d’intérêt que personne à sauver la ville, mais que je n’en avois pas un moindre à ne m’en point détacher dans les suites ; et qu’il convenoit, après ce que je venois de lui dire, que tout se pourroit concilier. Il me fit pour cela une ouverture qui ne m’étoit point venue dans l’esprit, et que je n’approuvai pas d’abord, parce qu’elle me parut impraticable ; mais à laquelle je me rendis à mon tour, après l’avoir examinée : ce fut d’obliger le parlement à entendre l’envoyé : ce qui feroit presque tous les effets que nous pourrions souhaiter. Les Espagnols, qui ne s’y attendoient point, seroient surpris agréablement ; le parlement s’engageroit sans le croire ; les généraux auroient lieu de traiter après ce pas, qui pourroit être interprété dans les suites comme une approbation tacite que le corps auroit donnée aux démarches des particuliers. M. de Bouillon n’auroit pas de peine à faire concevoir à l’envoyé l’avantage que ce lui seroit en son particulier de pou-