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[1649] MÉMOIRES

Ma première vue, quand je connus que le parlement se disposoit à donner entrée au héraut, fut de faire prendre les armes à toutes les troupes, de le faire passer dans les files en grande cérémonie, et de l’environner tellement, sous prétexte d’honneur, qu’il ne fût presque point vu et nullement entendu du peuple. La seconde fut meilleure : je proposai à Broussel, qui, comme des plus anciens de la grand’chambre, opinoit des premiers, de dire qu’il ne concevoit pas l’embarras où l’on témoignoit d’être dans cette rencontre ; qu’il n’y avoit qu’un parti, qui étoit de refuser toute audience et même toute entrée au héraut, sur ce que ces sortes de gens n’étoient jamais envoyés qu’à des ennemis, ou à des égaux ; que cet envoi n’étoit qu’un artifice grossier du cardinal Mazarin, qui s’imaginoit qu’il aveugleroit assez et le parlement et la ville, pour les obliger à faire le pas du monde le plus irrespectueux et le plus criminel, sous prétexte d’obéissance. Le bonhomme Broussel, qui demeura persuadé de la force de ce raisonnement, quoiqu’il n’eût qu’une apparence très-légère, le poussa jusqu’aux larmes. Toute la compagnie s’en émut ; on comprit que cette réponse étoit la naturelle. Le président de Mesmes, qui vouloit alléguer vingt-cinq ou trente hérauts envoyés par des rois à leurs sujets, fut repoussé et sifflé, comme s’il avoit dit la chose la plus extravagante. On ne voulut pas presque écouter ceux qui opinèrent au contraire et il passa à refuser l’entrée de la ville au héraut, et de charger messieurs les gens du Roi d’aller à Saint-Germain rendre raison à la Reine de ce refus.

M. le prince de Conli et l’hôtel-de-ville se servirent du même prétexte pour ne pas en-