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DU CARDINAL DE RETZ. [1649]

coup de rapport avec les bonnes dispositions de la cour à la paix, dont Brillac et le président Aubry s’étoient vantés d’être si bien informés : cette aventure, dis-je, jointe à l’apparition d’un héraut qui sembloit comme sorti à point nommé d’une machine, ne marquoit que trop visiblement un dessein formé. Tout le parlement le voyoit, comme tout le reste du monde : mais tout le parlement étoit propre à s’aveugler dans la pratique, parce qu’il est si accoutumé, par les règles de la justice ordinaire, à s’attacher aux formalités, que dans les extraordinaires il ne les peut jamais démêler de la substance. Il faut prendre garde à ce héraut, il ne vient pas pour rien ; voilà trop de circonstances ensemble ; on amuse par des propositions, on envoie des semeurs de billets pour soulever le peuple : un héraut paroît le lendemain : il y a du mystère. Voilà ce que la compagnie disoit, qui ajoutoit : Mais que faire ? Un parlement refuser d’entendre un héraut de son roi ! un héraut qu’on ne refuse même jamais de la part de son ennemi ! Tous parloient sur ce ton, et il n’y avoit de différence que le plus haut et le plus bas. Ceux qui étoient dévoués à la cour éclatoient, ceux qui étoient bien intentionnés pour le parti ne prononçoient pas si fermement les dernières syllabes. On envoya prier M. le prince de Conti et messieurs les généraux de venir prendre leurs places : et pendant que l’on attendoit les uns dans la grand’chambre, les autres dans la seconde, les autres dans la quatrième, je pris le bonhomme Broussel à part, et je lui ouvris un expédient qui ne me vint dans l’esprit qu’un quart-d’heure avant que l’on eût pris séance.