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lement s’échauffa beaucoup touchant la proposition : l’on contesta de part et d’autre assez long-temps, et il fut enfin conclu que l’on en délibéreroit le lendemain matin.

Le lendemain, qui fut le 12 février, Michel, qui commandoit la garde de la porte Saint-Honoré, vint avertir le parlement qu’il s’y étoit présenté un héraut revêtu de sa cotte d’armes et accompagné de deux trompettes, qui demandoit à parler à la compagnie, et avoit trois paquets, l’un pour elle, l’autre pour M. le prince de Conti, et l’autre pour l’hôtel-de-ville. On étoit alors sur le point de s’asseoir : tout le monde s’y entretenoit de ce qui étoit arrivé la veille à onze heures du soir dans les halles, où le chevalier de La Valette avoit été pris semant des billets injurieux pour le parlement, et encore plus pour moi. Il fut amené à l’hôtel-de-ville, où je le trouvai sur les degrés, comme je descendois de la chambre de madame de Longueville. Comme je le connoissois extrêmement, je lui fis civilité, et je fis même retirer une foule de peuple qui le maltraitoit. Mais je fus bien surpris quand, au lieu de répondre à mes honnêtetés, il me dit d’un ton fier : « Je ne crains rien, je sers mon roi. » Je fus moins étonné de sa manière d’agir quand on me fit voir les placards, qui ne se fussent pas à la vérité accordés avec des complimens. Les bourgeois m’en mirent à la main cinq ou six cents copies trouvées dans son carrosse. Il continua à me parler hautement : je ne changeai pas pour cela de ton avec lui ; je lui témoignai la douleur que j’avois de le voir dans le malheur, et le prévôt des marchands l’envoya prisonnier à la Conciergerie.

Cette aventure, qui n’avoit pas déjà beau-