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[1649] MÉMOIRES

qui s’étoit comme donné à moi. Le cardinal avoit demandé à Bouqueval, député du grand conseil, s’il ne croiroit pas être obligé d’obéir au Roi, en cas que le Roi lui commandât de ne point porter de glands à son collet : et il s’étoit servi de cette comparaison assez sottement, comme vous voyez, pour prouver l’obéissance aux députés d’une compagnie souveraine. Marigny paraphrasa ce mot en prose et en vers, un mois ou cinq semaines avant que le Roi sortît de Paris ; et l’effet que fit cette paraphrase est inconcevable. Je pris cet instant pour mettre l’abomination dans le ridicule : ce qui fait le plus dangereux et le plus irrémédiable de tous les composés.

Vous avez vu ci-dessus que la cour avoit entrepris d’autoriser les prêts par des déclarations, c’est-à-dire, à proprement parler, qu’elle avoit entrepris d’autoriser les usures par une loi vérifiée au parlement ; parce que les prêts qui se faisoient au Roi, par exemple sur les tailles, n’étoient jamais qu’avec des usures immenses. Ma dignité m’obligeoit à ne pas souffrir un mal et un scandale aussi général et aussi public. Je remplis très-exactement et très-pleinement mon devoir : je fis une assemblée fameuse de curés, de chanoines, de docteurs, de religieux ; et sans avoir seulement prononcé le nom du cardinal dans toutes les conférences, où je faisois au contraire toujours semblant de l’épargner, je le fis passer en huit jours pour le juif le plus convaincu qui fût en Europe.

Le Roi sortit de Paris[1] justement à ce moment ; et je

    un ouvrage où l’auteur essaie de prouver, par l’exemple de Moïse et autres, que tuer un tyran n’est pas un crime.

  1. Le Roi sortit de Paris : Le 6 janvier, jour des Rois.