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DU CARDINAL DE RETZ. [1649]

plus pour lui-même. Je l’aimois autant que je l’honorois, et je vis d’un coup d’œil le précipice. Je vous ennuierois si je vous rendois compte de toutes les conversations que j’eus avec lui sur cette matière. Vous jugerez, s’il vous plaît, des autres par celle dont je vais vous rapporter le détail ; elle se passa justement l’après-dînée du jour où l’on prétendit qu’il avoit menacé le parlement.

Je trouvai dans ce moment que le dégoût que j’avois déjà remarqué dans son esprit étoit changé en colère et même en indignation. Il me dit, en jurant, qu’il n’y avoit plus moyen de souffrir l’insolence et l’impertinence de ces bourgeois, qui en vouloient à l’autorité royale ; que tant qu’il avoit cru qu’ils n’avoient eu pour but que le Mazarin, il avoit été pour eux ; que je lui avois moi-même confessé plus de trente fois qu’il n’y avoit aucunes mesures bien sûres à prendre avec des gens qui ne peuvent jamais se répondre d’eux-mêmes d’un quart-d’heure à l’autre, parce qu’ils ne peuvent jamais se répondre un instant de leurs compagnies ; qu’il ne se pouvoit résoudre à devenir le général d’une armée de fous, n’y ayant pas un homme sage qui pût s’engager dans une cohue de cette nature ; qu’il étoit prince du sang ; qu’il ne vouloit pas ébranler l’État, que si le parlement eût pris la conduite dont on étoit demeuré d’accord, on l’eût redressé ; mais qu’agissant comme il faisoit, il prenoit le chemin de le renverser. M. le prince ajouta à cela tout ce que vous pouvez vous figurer de réflexions publiques et particulières. Voici en propres paroles ce que je lui répondis :

« Je conviens, monsieur, de toutes les maximes